mercredi 26 août 2015

Vers les élections anticipées en Turquie.

Europalia devient-il un instrument de propagande d’Erdogan?



Après avoir provoqué une déstabilisation sans précédent en Turquie par ses politiques répressives et guerrières, le président islamiste Recep Tayyip Erdogan a finalement dissout le parlement fraîchement élu dans le but d’éliminer le HDP, représentant les forces démocratiques arméniennes, assyriennes, grecques, kurdes et turques du pays et d’assurer ainsi une majorité absolue à son parti l'AKP pour qu’il puisse lui attribuer des pouvoirs despotiques très étendus.

La campagne électorale a déjà commencé avec les discours agressifs d’Erdogan contre les dirigeants de la communauté kurde. Bien que les électeurs en Turquie voteront le dimanche 1er novembre 2015, les citoyens turcs à l’étranger pourront voter à partir du 4 octobre 2015 dans les pays d’accueil comme la Belgique.



 
Il faut rappeler qu’Erdogan, avant les élections du 7 juin 2015, avait mené une campagne électorale en faveur de l’AKP dans les pays européens. Le 10 mai, il avait prononcé un discours partisan devant plus de dix mille citoyens turcs lors d’un meeting organisé par l’AKP et l’Ambassade de Turquie à Hasselt en Belgique. Grâce à cette campagne poussée, les électeurs turcs en Belgique ont voté à 62,93 % pour l’AKP alors que ce dernier n’a obtenu que 40,87 % des votes en Turquie.

Cette fois-ci, pendant la campagne électorale, le même Erdogan viendra en Belgique à l’occasion de l’inauguration du festival Europalia-Turquie (http://www.info-turk.be/441.htm#Europalia). Le 8 octobre, en tant qu’invité d’honneur, il sera présent au Bozar, accompagné du Roi des Belges. Sans aucun doute, la présence et les discours éventuels d’Erdogan en Belgique seront utilisés pour la propagande électorale de l’AKP.

Ce nouvel élément justifie davantage les critiques à l’égard de l’attribution du festival Europalia à la Turquie juste au 100e anniversaire du génocide des Arméniens et Assyriens. En effet, même après cent ans, l’État turc persiste dans son négationnisme tout en poursuivant des pratiques discriminatoires et répressives contre les communautés non turques.

Pour contrecarrer ces critiques, la directrice générale d'Europalia Kristine De Mulder avait affirmé que les communautés arménienne, assyrienne, grecque ou encore kurde seraient également mises en lumière lors du festival.

Mais une question reste toujours sans réponse : est-ce que les institutions représentatives de ces communautés ont été invitées à la programmation du festival si l’on veut vraiment les mettre en lumière?

Dans un communiqué du 30 juin 2015, Info-Türk a posé deux questions à l'intention des institutions arméniennes, assyriennes, grecques et kurdes :
  • Le mélange des cultures sera-t-il représenté effectivement dans ce festival comme il est souhaité par les communautés non turques et musulmanes de Turquie?
  • Quelles institutions arméniennes, assyriennes, grecques et kurdes ont été invitées à la programmation d'Europalia-Turquie?
Jusqu’ici nous avons reçu les réponses suivantes :

1. La Communauté arménienne de Belgique : 
Nous n’avons pas été invités à la programmation d’Europalia-Turquie…  

2. L’Association des Arméniens Démocrates en Belgique :
Personnellement, je n’ai jamais reçu une telle invitation. Même si quelques-uns de notre communauté sont invités pour présenter leur musique ou danse, ce ne sera qu’un geste pour les utiliser comme figurants de leur propre propagande.

3. L'Institut Assyrien de Belgique :
De notre côté nous ne participons pas aux programmes des festivités d'Europalia-Turquie. Mais nous organisons des activités en dehors de ce programme, spécialement pour les 100 ans du génocide assyrien de 1915, avec nos propres moyens. Est-ce que d'autres associations assyriennes prendront part à ces activités? On ne le sait pas.

4. Communiqué commun :
Le 27 juillet 2015 le Comité National Arménien de Belgique (CDCA), la Fédération des Araméens de Belgique, European Syriac Union (ESU), l’Institut Kurde de Bruxelles et le Comité de Soutien aux Chrétiens d’Orient (CSCO) nous ont envoyé un communiqué avec l’appel suivant au premier ministre belge : "il est encore temps d’éviter à notre pays et à son souverain le déshonneur et l’estompement de nos valeurs. Annulez Europalia-Turquie !

À l’heure actuelle, Europalia-Turquie annonce un programme auquel participent des artistes et intellectuels de Turquie, dont certains d’origines non turques.


Il est fort possible qu’une grande partie de ces artistes et intellectuels y participent sans connaître l’arrière-plan de ce projet destiné à innocenter un régime négationniste au centenaire du génocide de 2015 et plus particulièrement à honorer un chef d’État qui figure déjà dans le panthéon des dictateurs détestés.


Info-Türk

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lundi 24 août 2015

Chronique de Dominique Jamet du 23 août

Chronique de Dominique Jamet du 23 août
Jamet le dimanche !
Dominique Jamet, vice-président de Debout la France depuis 2012 mais également journaliste depuis... toujours tient chaque semaine sur le site de Debout la France une chronique où il commente très librement l'actualité politique.




Les bras ballants


Ce n’est pas seulement toute la misère, c’est aussi tout le malheur du monde qui déferle sur nos rivages. Nées en Afrique et en Asie, là où les capacités de souffrance semblent aussi inépuisables que les réserves de population,  des vagues de plus en plus puissantes viennent se briser sur les antiques parapets de la vieille Europe et franchissent le plus souvent les digues délabrées que l’on prétend leur opposer.

On ne peut retenir l’Océan avec les mains. Impuissants à contenir une inondation jusqu’à présent pacifique, les garde-côtes qui patrouillent en Méditerranée, débordés, se contentent d’acheminer jusque dans les ports italiens ou grecs ceux-là mêmes à qui ils sont censés barrer la route et l’on a vu pour la première fois la police d’un petit État, la Macédoine, baisser les bras devant la foule des migrants en quête d’improbables Eldorados.

Les exécutants, matériellement dépassés, ne sont pas en cause. Ce n’est pas à leur niveau que se prennent ou plutôt que devraient se prendre les décisions. Ce sont les politiques qui, sur le terrain de l’immigration comme sur celui de l’insécurité, se comportent comme des témoins impuissants, hébétés, divisés, les bras ballants, face à un problème économique, social et humain qu’il leur incombe normalement de résoudre.

L’Union européenne s’est montrée incapable de définir et de mener une politique commune dans ce domaine. Comment le pourrait-elle ? Certains de ses membres, dont le chef de file est l’Allemagne, sont dans une situation économique et démographique telle qu’ils ne redoutent nullement, bien au contraire, l’afflux d’une population étrangère jeune et dynamique. D’autres, comme la France, déjà incapables de loger, d’employer leurs nationaux, d’assimiler leurs émigrés, ne sont pas en mesure d’accueillir des centaines de milliers de nouveaux arrivants qui viendraient alourdir encore une barque qui fait déjà eau de toutes parts. Mais les traités que nous avons signés, les règles que nous nous sommes imprudemment engagés à appliquer et notamment celles qui ont créé l’espace Schengen nous interdisent de mener la politique d’intérêt national qui consisterait en l’occurrence à reprendre le contrôle de nos frontières. Encore ne s’agit-il là que du court terme et de l’urgence. Le problème persistera et s’aggravera tant que la communauté internationale n’aura pas rétabli l’ordre là où règne le chaos, la paix là où se déchaîne la violence et aidé au développement des pays émergents. Vaste programme.

Nos dirigeants, le nez dans le guidon, dénoncent la montée de la xénophobie et de ce qu’ils appellent le populisme. Personne d’autre qu’eux ne nourrit les monstres qui les affolent et qui ne doivent leur naissance et leur croissance qu’à leur inertie, à leur incurie et à leur lâcheté. Le réveil de peuples menacés dans leur tranquillité, leur sécurité et leur identité est la réaction naturelle d’un organisme qui face à une attaque sécrète des anticorps. 

Le déclin des vieux partis, le divorce entre le peuple et ses représentants est la sanction de leur démission. L’ambition est la chose du monde la plus facile et la plus répandue. Mais quel sens a-t-elle si l’on n’accède au pouvoir que pour y fuir ses responsabilités, si l’ambition satisfaite se révèle une imposture. La démocratie n’est pas incompatible avec la volonté de Clemenceau, le courage de Pierre Mendès France, la lucidité de Philippe Séguin, la grandeur de Charles de Gaulle. Celui-ci n’avait pas rétabli la République et restauré l’État pour en confier la direction à des limaces.


Dominique Jamet
Vice-Président de Debout la France

Contact presse : Isabelle d’Halluin idhalluin41@gmail.com