jeudi 27 juin 2013

Quand le voile se lève à Doha !

Quand le voile se lève à Doha ! 

 
Onze pays, qui se sont autoproclamés « Amis » de la Syrie, se sont réunis - samedi - au Qatar pour étudier les voies et moyens « d’intensifier » l’aide à la sédition syrienne.
Onze pays, pas un de moins, pas un de plus. A moins d’une erreur de notre part, ces onze pays ne représentent qu’une mince « fraction » de la communauté internationale regroupée dans les Nations unies (ONU, 194 pays membres à ce jour).

26 juin 2013

Une minorité donc, certes agissante, menée par trois puissances nucléaires membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU (Etats-Unis, France, Grande-Bretagne) les monarchies du Golfe à leur tête le Qatar et l’Arabie Saoudite et la Turquie. Des puissances militaires alliées à des puissances financières contre un Etat souverain.
Elles sont à la pointe de l’action contre le gouvernement syrien et le président Al Assad. Les cinq autres nations ne sont que des comparses qui font nombre. A Doha, les « Amis » de la Syrie n’étaient là que pour officialiser la livraison d’armes de guerre à la rébellion syrienne.
Or, avant même le communiqué final établissant la décision d’une « aide militaire » à l’insurrection en Syrie, Louai Mokdad, porte-parole de l’ASL (Armée syrienne libre, formée de déserteurs et de mercenaires), annonçait déjà (vendredi) que celle-ci avait reçu « récemment » de l’étranger « des quantités d’armes modernes » susceptibles de « changer le cours de la bataille ».
Nous avons donc là une coalition qui soutient notoirement une insurrection contre un pays indépendant. Dans cette guerre effarante livrée à la Syrie et son peuple, des forces de la réaction ont misé sur une « opposition » disparate et hétéroclite incapable par elle-même de mettre en danger le régime syrien.
Or, outre la rébellion, officiellement soutenue par des membres permanents du Conseil de sécurité, il y a ces « jihadistes » représentés par le Front Al-Nosra - groupe qui figure sur la liste noire américaine des fractions terroristes - armé et financé par le Qatar et l’Arabie Saoudite.
Le Qatar ne s’en est d’ailleurs jamais caché qui espère l’avènement d’un gouvernement islamiste à sa dévotion à Damas. Gouvernement dont Washington s’accommoderait fort bien, lequel traite déjà avec de tels régimes, qui sont ses principaux alliés au Moyen-Orient.
Donc trêve de faux-fuyants, le sort des Syriens - les seules vraies victimes d’une guerre barbare menée contre leur pays - indiffère totalement ces « Amis » de la Syrie dont l’objectif est de faire tomber l’obstacle que constitue à leurs yeux l’actuel régime syrien, lequel n’entre pas dans le plan de domination du Moyen-Orient.
Or, après un moment de flottement et surprise par les attaques rebelles, l’armée syrienne commence à reprendre ces dernières semaines du terrain face à la rébellion. Cela a bouleversé les schémas établis par les Occidentaux et les monarchies qui s’attendaient à ce que le régime d’Assad tombe comme un fruit mûr.
De fait, vendredi, la langue du chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, a fourché qui admettait indirectement ce fait, s’exclamant : « (...) Il n’est pas possible d’envisager qu’il y ait tout d’un coup un succès total de Bachar al-Assad. Ce n’est pas du tout dans les prévisions. »
Ce n’est pas dans les prévisions ! Ce sont bien là les mots utilisés par M. Fabius. Ce qui lève un peu le voile sur la prétendue « révolte » du peuple syrien et sur le « véritable » complot suscité contre le pouvoir syrien.
Par la magie des mots tout peut basculer, et l’identité des choses remonter à la surface, donnant du sens à des évènements alors inconcevables.
D’autre part, en visite dimanche à Doha, le président français, François Hollande a indiqué, à l’issue d’un entretien avec l’émir du Qatar, cheikh Hamad ben Khalifa Al Thani, que la France et le Qatar avaient « une approche commune » sur le conflit syrien, visant à aider l’opposition à « améliorer sa position sur le terrain pour parvenir à une solution négociée ». Cela veut dire que M. Hollande, en accord avec l’émir du Qatar estime que la fin justifie les moyens. On ne l’a pas entendu condamner les fatwas, d’Al Qaradhaoui - appelant à l’assassinat du mufti de Damas, Ramadan Al Bouti - ou celles d’Al Arifi autorisant les viols des mineurs par les « jihadistes » qui font régner la terreur en Syrie.
Dans l’imbroglio syrien il est devenu chimérique de séparer le bon grain de l’ivraie, et les « Amis » de la Syrie qui ont fait leur choix aident en fait des barbares et savent bien à quoi s’en tenir quant aux tueries qui endeuillent la Syrie et qui en sont les vrais auteurs.
Doha, aura au moins servi à montrer au monde après deux années de duplicité, le vrai visage des pays qui attisent la guerre en Syrie.

Karim Mohsen
L’Expression (Algérie), 25 Juin 2013.
 

mercredi 19 juin 2013

Lettre ouverte à Joëlle Milquet



  • Affaire Bahar Kimyongür
 

Joëlle Milquet
Vice-Première ministre,
Ministre de l'Intérieur et de
l’Egalité des chances
Rue de la loi, 2
1000 Bruxelles - BELGIQUE


Alfortville, le 18/06/2013

Madame la ministre,

Au moment où la Turquie, à travers son Premier ministre, montre son vrai visage d’un pays totalitaire islamiste, méprisant la voix de son peuple qui aspire à une vraie démocratie dont les peuples de Turquie sont privés depuis près de 90 ans, et notamment après le putsch de 1980, vous vous rendez complice de la police turque pour faire arrêter un intellectuel belge (d’origine turque) Bahar Kimyongür, avec un risque d’extradition vers ce pays de « Midnight Express ».

Nous sommes d’autant plus atterrés que vous êtes également chargée pour garantir l’égalité des chances dans votre pays ! Pourquoi quelqu’un qui critique les positions de l’Union européenne, des Etats-Unis et d’Israël dans le dossier syrien serait considéré comme un agitateur, ou pire, comme un terroriste. Où est passé votre sens de la démocratie ?

Votre servilité vis à vis de la Turquie est un nième exemple de l’allégeance que la Belgique fait depuis des années à la Turquie. Dans quel but ?

Pensez-vous qu’en agissant de la sorte vous aidez la Turquie à se démocratiser ?

Vous priant de reconsidérer votre position vis-à-vis de Bahar Kimyongür,
Veuillez agréer, Madame, nos salutations distinguées.



Varoujan Sirapian
Président fondateur de
l’Institut Tchobanian
Directeur de la revue « Europe&Orient »

Liberté pour Bahar !

Bahar Kimyongür arrêté : 
La vérité dérange, Milquet se venge




On vient d'arrêter à Madrid notre ami et collègue Bahar Kimyongür, auteur du livre Syriana et de nombreux articles démontrant l'hypocrisie des gouvernements européens sur la Syrie. Ces dernières semaines, il s'était activement mobilisé pour aider les parents désemparés de ces jeunes qui partent en Syrie. Il est attendu au débat que nous coorganisons sur ce thème à Bruxelles mardi 25 juin.
Bahar Kimyongür
Bahar est menacé d'extradition vers la "très démocratique" Turquie. Nous sommes très inquiets et convaincus que le gouvernement belge est complice : Bahar dérange, la vérité dérange.


D'ailleurs, la chronologie est très claire :


22 mai : communiqué de la ministre de l'Intérieur : "Joëlle Milquet a longuement rencontré ce matin, lors d’un déjeuner, le directeur de l’Organisation du renseignement national turc, Hakan Fidan. Lors de cet échange très constructif, plusieurs modalités de collaboration et d’échanges d’informations dans les différents dossiers évoqués ont été précisées et renforcées, en ce qui concerne notamment la présence de ressortissants belges en Syrie mais aussi le suivi et le contrôle des différents groupements terroristes".


28 mai : la Turquie délivre en secret un nouveau mandat d'arrêt international contre Bahar (qui avait été acquitté il y a dix ans par la Justice belge pour ces accusations arbitraires).


13 juin : A la RTBF radio, la ministre Milquet soutient le "démocrate" turc Erdogan : "Je pense que les services secrets turcs sont sincères" (sic). (Et aussi ses tortionnaires et ceux qui emprisonnent des journalistes en masse ?) Elle diabolise Bahar comme "soutien d'Assad" alors que celui-ci a, dans son livre, dénoncé ses aspects dictatoriaux.


17 juin : Bahar est arrêté par des civils alors qu'il visitait avec son épouse Deniz et ses deux petits enfants la cathédrale de Cordoue (Espagne). En présence de ses enfants pour bien marquer le coup !


Ce jeudi 20 juin, il passe devant le juge à Madrid.


Nous appelons chacun à dénoncer cette violation du droit d'expression, cette basse vengeance des politiciens qui s'alignent sur les États-Unis, Israël et la Turquie !


Faites circuler ce message sur le Net, Facebook et partout, interpellez vos mandataires politiques et les médias.


Demandez des comptes à la ministre Milquet.
Elle ne bouge pas pour aider les parents désemparés, mais se rend complice d'Erdogan pour arrêter Bahar :
Cabinet du ministère de l'Intérieur, 2 rue de la Loi, 1000 Bruxelles
Tél : 02 504 85 40 Attaché de presse : Geoffroy Kensier : 0478 59 41 51


Liberté pour Bahar ! Liberté d'expression contre la guerre !

YaSMiN SaMaaN

vendredi 7 juin 2013

Fabius pour une intervention militaire en Syrie

L’offensive de Fabius pour une intervention militaire en Syrie

Après la publication par Le Monde d’un « reportage » censé apporter la « quasi preuve » que Bachar el-Assad utilise des armes chimiques, et dont tout indique qu’il a été « monté » en collusion avec le gouvernement français (*), l’offensive diplomatique de ce dernier pour tenter à toute force d’obtenir une intervention militaire en Syrie vient de franchir un nouveau pas.


6 juin 2013 
http://www.silviacattori.net/article4514.html


« La France a désormais la certitude que le gaz sarin a été utilisé en Syrie à plusieurs reprises et de façon localisée » a déclaré le 4 juin le ministre des affaires étrangères Laurent Fabius dans un communiqué, en précisant par la suite sur France 2 qu’il ne faisait « aucun doute » que ce gaz avait été utilisé par « le régime et ses complices ». La stratégie du mensonge qui a déjà permis aux puissances de l’OTAN de bombarder la Serbie, l’Afghanistan, l’Irak, la Libye, va-t-elle cette fois encore permettre de frapper la Syrie ?
Après avoir qualifié les mercenaires qui depuis deux ans terrorisent et martyrisent le peuple syrien de « résistants, révolutionnaires », après avoir répété « Bachar doit partir », au mépris de la volonté de son peuple qui soutient à 70% son gouvernement [1], après avoir appelé l’Union européenne à armer ces mercenaires, Laurent Fabius prétend maintenant détenir des analyses de laboratoire « prouvant l’usage de gaz sarin » par l’armée regulière syrienne.
Quelle crédibilité peut-on accorder aux « preuves » que Laurent Fabius tient de deux journalistes revenus de Syrie avec des échantillons dont la « provenance » ne peut pas être établie avec certitude, et dont les analyses ont été confiées au « centre de recherche du Bouchet, qui dépend de la Délégation générale de l’armement (DGA) » [2] ?
L’ « enquête » réalisée en Syrie par Le Monde, cela saute aux yeux, est un coup monté de toute pièce. Un coup qui a impliqué des agents secrets français. Les fameuses fioles remises par la France à l’ONU constituent un enjeu capital pour la France dont la lamentable diplomatie a reçu gifle après gifle. N’importe quel État ou groupe peut en fabriquer, comme cela s’est déjà vu avec l’Irak quand Powell a brandi une fiole à l’ONU en 2003 pour justifier la guerre qui devait renverser Saddam Hussein, présenté lui aussi sous les traits du Grand Satan.
Pourquoi M. Fabius et les journalistes du Monde n’ont-ils fait aucun tapage médiatique quand, le 29 mai, la police turque avait découvert quatre kilos de gaz sarin à Adana, en Turquie, en possession de membres du front Al Nosra qui auraient avoué vouloir acheminer ce gaz sarin vers les zones de combat en Syrie ? [3]
Pourquoi quand le 2 mai l’armée régulière syrienne a saisi deux kilo de gaz sarin dans la ville de Hama, lors d’une opération contre les « combattants armés » [4], cela n’a-t-il pas non plus été rapporté par Le Monde ?
Les États-Unis ont réagi avec une grande prudence aux « révélations » de M. Fabius : « Nous devons augmenter le faisceau des preuves en notre possession (...) avant de prendre une décision (…) Il nous faut enquêter davantage », a déclaré le porte-parole de Barack Obama.
Même prudence du côté de l’ONU qui par le passé avait couvert les mensonges et les abus des puissances qui ont conduit l’Irak et la Libye à leur perte : « Il n’est pas sûr que ces renseignements soient valides, en l’absence d’indications suffisantes sur la traçabilité des données recueillies » a prévenu Ake Sellström, chef de la mission d’enquête chargée par Ban Ki-Moon de vérifier les accusations d’emploi d’armes chimiques en Syrie. [5]
Combien de temps M. Fabius va-t-il encore pouvoir répéter sa « certitude » que Bachar el-Assad « a utilisé du gaz sarin » ? Combien de temps les médias français comme Le Monde et Libération vont-ils pouvoir continuer de mentir avec lui ?
Combien de temps faudra-t-il à l’opinion publique pour comprendre que les objectifs de leur gouvernement -la France et la Grande Bretagne en tête- sont criminels et que les reporters de guerre, envoyés spéciaux, correspondants -de France télévision, Radio France, Arte, France 25 notamment- qui couvrent leur crimes sont généralement liés aux renseignements militaire et font partie d’un tout, de la machine de guerre ?



Silvia Cattori


[1] Voir : « OTAN : 70% des Syriens soutiennent Assad », 2 juin 2013.
http://www.silviacattori.net/article4508.html
Et, selon un rapport de l’agence centrale du renseignement américain (CIA) « un ensemble de rapports et de sondages collectés au sujet des élections présidentielles de 2014 vient le confirmer : si Bachar al-Assad est à nouveau candidat, il l’emportera avec 75% des voix ».
[2] Voir : « Syrie : comment les échantillons de gaz sarin ont été rapportés », par Jean-Philippe Rémy, Le Monde, 5 juin 2013.
http://www.lemonde.fr/international/article/2013/06/05/la-france-confirme-deux-cas-d-utilisation-de-gaz-sarin-en-syrie_3424378_3210.html
[5] Voir : « Prudence à l’ONU après les annonces sur le gaz sarin en Syrie », Reuters, 6 juin 2013.
http://fr.news.yahoo.com/prudence-%C3%A0-lonu-apr%C3%A8s-les-annonces-sur-le-084446304.html

dimanche 2 juin 2013

Manifestations à Istanbul et Ankara



Manifestations à Istanbul et Ankara

Les manifestants turcs continuent à défier le gouvernement.


ISTANBUL, 03 juin 2013 (AFP) - et de notre correspondant Erol Ozkoray

Au troisième jour de leur mouvement, les manifestants turcs ont maintenu dimanche la pression sur le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan en occupant la place Taksim d'Istanbul, tandis que de nouveaux incidents ont éclaté dans la capitale Ankara.

D.R.

 Plusieurs milliers de personnes continuaient tard dans la soirée à manifester contre le gouvernement islamo-conservateur dans le quartier résidentiel de Kavaklidere, à Ankara, après avoir été brutalement délogés plus tôt par la police de la place centrale de Kizilay de la capitale.
"Personne ne veut de toi Tayyip", scandaient les protestataires à Ankara.
Les manifestants reprochent au Premier ministre Erdogan d'être trop conservateur et de aux manifestants de vouloir "islamiser" la société turque.
"Tous les Turcs sont sous pression depuis dix ou onze ans", a confié à l'AFP Hallit Aral, "aujourd'hui, tout le monde veut que le Premier ministre s'en aille".
La police a tiré dimanche après-midi des dizaines de grenades lacrymogènes et fait usage de canons à eau pour disperser les protestataires rassemblés sur la place de Kizilay.
Les forces de l'ordre sont aussi intervenues à plusieurs reprises afin d'empêcher un millier de protestataires qui voulaient se diriger vers les bureaux du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan.
"L'intervention est constante, la police n'arrête pas de repousser les manifestants qui ne les menacent absolument pas. Nous avons beaucoup de mal à respirer", a indiqué Gözde Özdemir, une secrétaire âgée de 27 ans.
Plusieurs personnes ont été blessées, a affirmé cette protestataire.

Notre correspondant Erol Ozkoray écrit : "Je viens d'arriver de Taksim où il y avait au moins 500.000 personnes pour fêter le retrait de la police (au bout de cinq jours de combat très très dure et inimaginable). J'ai vu un groupe composé de 5.000 personnes qui ont résisté durant 6 heures sans faire un pas en arrière face à des bombes lacrymogènes qui pleuvaient sur eux (minimum 2-3 par seconde durant 6 heures). Je n'en reviens toujours pas. Nous avons gagné donc la première bataille. Mais ce qui est important les Turcs découvrent pour la première fois ce que c'est l'individualisme qui est la base même pour construire une vraie démocratie (voir le livre de Nurten). Toutes les couches de la société de tout âge sont présents donc. Derrière ce mouvement de révolte il n'y a aucun parti, aucune institution, aucune organisation. C'est spontané. Nous sommes en face de l'homme/de la femme révolté. Aucune peur aussi. Partie d'un petit parc d'Istanbul,  cette révolte s'est propagée, en deux jours, à une cinquantaine de ville de Turquie. Quand tu n'as pas peur tu déplaces les montagnes, tu tiens tête contre l'autoritarisme, le fascisme (vert) et le totalitarisme (sournois, dans le cas turc). C'est une première dans toute l'histoire de la République, c'est-à-dire depuis 90 ans. Donc, une nouvelle ère commence pour ce pays, de là il y aura un nouveau parti politique qui va naître (ça c'est sûr). Rien ne sera donc comme auparavant. Si on réussi à canaliser ce mouvement spontané, très démocratique et très conscient nous pourrons enfin construire une vraie démocratie. Après les Kurdes qui luttent depuis 30 ans contre l’État autoritaire et fascisant, les Turcs découvrent avec beaucoup de retard la voie qui mène vers la démocratie: c'est-à-dire la lutte frontale sans laquelle il sera impossible de passer à une démocratie."
 
Selon l'agence officielle Anatolie, environ 200 personnes ont été interpellées et ont été amenées à bord d'autocars de la police à la direction de sûreté.
A Istanbul, tout l'après-midi, des milliers de personnes ont envahi l'emblématique place du centre de Taksim, désormais vide de toute présence policière après deux jours de violents incidents qui ont fait plusieurs centaines de blessés et provoqué l'arrestation de plus de 1.700 manifestants dans toute la Turquie.
Fer de lance du plus important mouvement de contestation populaire du gouvernement islamo-conservateur turc depuis son arrivée au pouvoir en 2002, les militants de la société civile turque ont largement cédé la place à la gauche et à l'extrême gauche qui ont célébré leur victoire après le retrait des forces de l'ordre samedi.
Au terme d'une journée plutôt calme, des affrontements ont repris dans la soirée entre les forces de l'ordre et plusieurs milliers de manifestants qui s'étaient réunis autour des bureaux stambouliotes du Premier ministre.
Dans la nuit de samedi à dimanche déjà, des affrontements très violents avaient opposé policiers et manifestants dans la capitale, causant d'importants dégâts.
Selon le syndicat des médecins d'Ankara, 414 civils avaient été blessés dans ces incidents, dont six souffrant de graves traumatismes à la tête. De son côté, l'agence de presse Anatolie a fait état de 56 blessés au sein des forces de l'ordre.
Signe de la persistance de la mobilisation, des manifestations contre le pouvoir ont également eu lieu à Izmir (ouest), Adana (Sud) et Gaziantep (sud-est).
Sous le feu des critiques, le Premier ministre a été contraint samedi de lâcher du lest, au terme de deux jours d'affrontements, ordonnant à la police de quitter la place Taksim et le petit parc Gezi, dont la destruction annoncée a donné le signal de la révolte.
Critiques
Les organisations de défense des droits de l'Homme turques et étrangères ont dénoncé la violence de la répression, faisant état de plus de mille blessés. Amnesty International a même évoqué la mort de deux personnes.
Ces chiffres n'ont pas été confirmés de source officielle. Le ministre de l'Intérieur Muammer Güler n'a fait état que de 58 civils et 115 policiers blessés pendant les 235 manifestations recensées depuis mardi dernier dans 67 villes du pays. Selon M. Güler, la police a interpellé plus de 1.700 manifestants, pour la plupart rapidement relâchés.
Au sein même du pouvoir, plusieurs voix dissonantes se sont fait entendre pour regretter la brutalité des interventions policières. Le chef de l'Etat Abdullah Gül a jugé "inquiétant" le niveau de la confrontation. Et le vice-Premier ministre Bülent Arinç a prôné le dialogue "plutôt que de tirer du gaz sur des gens".
Des pays alliés occidentaux, comme les Etats-Unis et le Royaume-Uni samedi, puis la France dimanche, ont eux aussi appelé le gouvernement turc à la retenue.
Le ministre turc des Affaires étrangères Ahmet Davutoglu a lui-même déploré les dommages causés par ces événements à la "réputation" de son pays qui, a-t-il dit sur son compte Twitter, est "admiré dans la région et dans le monde".
Face à ces réactions, le Premier ministre a reculé et concédé que la police
avait agi dans certains cas de façon "extrême". "Il est vrai qu'il y a eu des erreurs, et des actions extrêmes dans la réponse de la police", a-t-il dit, ajoutant qu'une enquête avait été ordonnée par le ministère de l'Intérieur.
Mais il a répété qu'il mènerait le projet d'aménagement urbain contesté de la place Taksim jusqu'à son terme.
Et comme un nouveau défi aux manifestants qui lui reprochent de vouloir "islamiser" la société turque, M. Erdogan a confirmé dimanche qu'une mosquée serait bâtie sur la place Taksim, rendez-vous traditionnel de toutes les contestations à Istanbul.
"Oui, nous allons aussi construire une mosquée. Et je ne vais pas demander la permission du président du CHP (Parti républicain du peuple, principal parti d'opposition) ou à une paire de pilleurs pour le faire", a-t-il lancé, "ceux qui ont voté pour nous nous ont déjà donné l'autorité pour le faire".