« Le mariage pour tous »
Une supercherie linguistique doublée d’un mensonge
Dans le concert des arguments développés
par les « pour » et les « anti »
mariage gay, il est une voix qu’on n’a jamais entendue : celle de la langue française.
Au cours de mes 40 années d’enseignement (collège et lycée) en qualité de professeur de Lettres Classiques, j’ai toujours attaché une grande importance à la valeur des mots. Choisir le mot exact, le
« polir sans cesse » comme disait Boileau, c’est à la fois s’assurer qu’il exprime parfaitement ce que l’on veut dire mais c’est aussi
s’assurer que l’on sera bien compris de son auditoire.
La polémique que suscite le projet de loi
sur le mariage gay offre un bel exemple de cette dilution de
la pensée dans le brouillard d’une terminologie approximative.
A force de triturer les mots dans tous les sens,
les mots n’ont plus de sens et l’opinion déboussolée y perd son latin.
Les
slogans réducteurs
répercutés par les médias ne font qu’entretenir la confusion au point qu’on a parfois l’impression d’avoir perdu
le sens commun.
Prenons quelques exemples :
Premier exemple : La notion de
« couple » homosexuel est-elle adaptée ? La réponse est non.
Si l’on se réfère à la terminologie du « Bon Usage
», l’assemblage de deux éléments de même nature
ne
constitue pas un « couple »
mais une
« paire ». Ainsi, on dira une paire de ciseaux, une paire de
lunettes et non un couple de ciseaux ou un couple de lunettes. Il
en est de même pour les êtres
vivants. Deux bœufs assemblés sous le même joug forment une paire de bœufs et non un couple de bœufs. Deux jumeaux de même sexe constituent une paire de jumeaux et non un couple de jumeaux. On pourrait multiplier les exemples.
La langue française nous indique clairement que la notion de « couple » repose sur un principe de différenciation et d’altérité.
Le
couple, c’est « un homme et une femme unis par des relations affectives, physiques »
(Robert 2012). La prise en compte de la fin de la définition ne doit pas faire
oublier le début.
La
distorsion sémantique à laquelle on s’adonne chaque fois qu’on évoque un
« couple » homosexuel crée une confusion dommageable que rien ne peut justifier, pas même une évolution des mœurs. Il
s’agit bien ici d’appeler un chat « un chat »
2ème exemple : qu’est-ce qu’un parent ?
La reconnaissance officielle du « couple »
homosexuel entraîne nécessairement – tout le monde le
sait
- une modification du Code Civil.
La
disparition des mots « père »
et « mère » au profit de la
notion de « parent 1 »
et « parent 2 » n’est en fait qu’une supercherie linguistique
doublée d’un mensonge puisque le mot désigne étymologiquement les deux personnes (père et mère)
qui conjointement sont à l’origine de toute naissance.
En
latin, le verbe parere veut dire « engendrer » pour le père, et « enfanter »
pour la mère. Comment peut-on expliquer à un enfant que ce mot de « parent » (quel que soit son numéro) s’applique à une personne qui est
totalement étrangère à sa naissance, un clandestin en quelque sorte ? La loi peut-elle cautionner ce mensonge ?
Ces deux exemples suffisent à démontrer que la terminologie avancée par les partisans de la loi n’est qu’un écran de fumée destiné à masquer une stratégie plus sournoise que les récentes
manifestations viennent d’ailleurs de confirmer. Il semble en effet que les partisans du « mariage pour tous » se soient déjà engouffrés
dans une brèche : l’incohérence du projet de loi :
Une incohérence interne à la loi : un « couple »
homosexuel est par définition stérile.
Il est donc logique que les homosexuels aient recours à des artifices s’ils veulent avoir des enfants. C’est le sens
de
leur revendication première : le droit à l’adoption, baptisé outrageusement « droit à l’enfant ». Le projet de loi
prévoit cette disposition mais interdit la PMA (procréation médicalement assistée pour les femmes) et la GPA
(gestation pour autrui pour les hommes c’est-à-dire le recours possible à une
mère
porteuse). Comment justifier cette contradiction alors que la loi
du
« mariage pour tous » est présentée comme une extension des droits ? Les récentes manifestations des partisans du mariage
ont
clairement démontré que les homosexuels entendaient s’appuyer sur cette contradiction pour pousser plus loin leurs exigences. Sur cette question,
on
note les premiers signes d’un fléchissement
de
la part des promoteurs de la loi. Le recours à la PMA, exclue dans un premier temps, pourrait faire
l’objet d’un amendement présenté par les députés de la majorité. Cette concession, logique en elle- même, met à nu la vraie nature du débat. Le « mariage pour tous », présenté au départ comme l’objectif essentiel, apparaît de plus en plus clairement comme un simple point de passage, une étape transitoire
pour obtenir «
in
fine » une égalité de droit pleine et entière avec les couples hétérosexuels stériles.
Comme le droit à l’adoption ne changera pas grand-chose à la situation des homosexuels, vu les réticences de la plupart des états à confier des enfants à des homosexuels, c’est bien sur la PMA et la GPA
que
se concentre toute la pression. Une fois acquis le droit à la PMA pour les femmes
homosexuelles, comment interdire aux hommes, au nom de ce même principe d’égalité, d’avoir recours à la GPA ? Si
c’était le cas,
il y
aurait là une discrimination incompréhensible, voire une injustice, tout à fait contraire à l’esprit même du projet de loi.
Le piège des slogans
Il est une autre supercherie linguistique qu’il
convient de dénoncer
et qui
tient au discours même des
homosexuels. Pendant longtemps, leur combat a été placé sous le signe du « droit à la différence »,
droit qui leur a été reconnu par l’ensemble de la communauté nationale avec la création du PACS. Aujourd’hui, le thème du « droit à la différence »
a totalement disparu du glossaire homosexuel. Bizarre
! Ce virage à 180 degrés a quelque chose de surprenant et pourtant personne ne s’en étonne. Il
est vrai que le slogan « le mariage pour tous
» est plus rassurant et plus rassembleur que « le droit à la différence » jugé sans doute
trop « clivant » pour employer un terme à la mode, un concept
dépassé en tout cas que l’on range sans complexe au rayon des accessoires. Au contraire, «
le mariage pour tous » sonne comme un appel à la
fête, à la fusion universelle de toute l’humanité, un remake d’ «
Embrassons-nous, Folleville
», en somme une préfiguration du « paradis pour tous ».
Qui peut résister à un tel programme ?
Malheureusement, cette vision édénique du mariage est en décalage complet avec la réalité des
faits. Il est d’abord étrange que le PACS ait eu si peu de succès auprès
de la communauté
homosexuelle alors que cet aménagement de la législation était notamment prévu pour elle. Et si le
mariage présente tant d’attraits, comment expliquer que tant d’hommes et de femmes, de la base
jusqu’au sommet de l’Etat, choisissent l’union libre c’est-à-dire le non-mariage
?
Il est notable également que nombre d’homosexuels vivent leur vie le plus naturellement du monde
sans réclamer nécessairement le passage devant Monsieur le Maire. Certains même s’étonnent de ce déchaînement médiatique sur une question qui leur est totalement étrangère.
Alors, au bout du compte, que penser de tout
ce tapage, de tout ce galimatias
?
Pas grand chose, sinon que derrière ces acrobaties sémantiques ou stylistiques, il y a la volonté de nier une évidence.
La négation d’une évidence :
Quel que soit le mode de procréation choisi, la naissance d’un enfant est nécessairement le résultat de la rencontre de deux cellules, masculine et féminine. La différenciation sexuelle est constitutive de l’être humain, même si les choix de vie peuvent ensuite amener certains individus à la vivre
différemment. De ce fait, on ne peut admettre qu’une simple évolution des mœurs soit un argument
suffisant pour modifier le statut du couple et celui
de
la famille, tels qu’ils nous ont été transmis depuis les origines de notre civilisation. Les Romains eux-mêmes, qui pratiquaient librement et
indifféremment les deux formes de sexualité, n’ont jamais songé à remettre en question ce mode
d’organisation de la famille pour une raison très simple mais essentielle
: cette structure de la cellule familiale est la seule à garantir la filiation. Grands législateurs (ne pas oublier au passage que
notre Code Civil découle directement du Droit Romain), ils ont toujours tenu à préserver ce socle de
l’organisation sociale. Quant à l’adoption,
très
courante à Rome, elle a toujours été soigneusement encadrée par tout un arsenal juridique de manière à préserver l’intégrité des liens du sang.
De
ce fait, l’adoption n’était juridiquement admise que dans le cadre d’une famille déjà constituée et sur le modèle du couple hétérosexuel.
Jamais deux sans trois
:
Mais il y a plus grave : la stérilité naturelle du « couple homosexuel » induit nécessairement
l’intervention d’un tiers de l’autre sexe pour le rendre fécond. Dès lors, l’accès à la PMA
ou
à la GPA (quelle que soit la procédure adoptée,
c’est-à-dire avec ou sans rapport sexuel) conduit à s’interroger
sur la nature de ce prétendu « couple
» qui ne peut assurer à lui seul
son désir d’enfant.
Ce
qui revient à dire que le contrat de mariage que signeraient deux personnes de même sexe inclut
nécessairement l’intervention prévisible d’une troisième personne. Il ne s’agit donc plus d’un
« couple »
mais d’une
« triade », une forme d’adultère biologique accepté et reconnu par la loi. Sans
parler des inévitables dérives financières qu’entraînera nécessairement la recherche effrénée de donneurs et de mères
porteuses. Dans certains pays, on assiste déjà à des combinaisons multiples où les homosexuels s’adjoignent - pour un temps ou pour longtemps et moyennant finances –
le concours d’une ou plusieurs personnes pour mener à bien leur projet.
Nous sommes là devant le risque majeur d’une marchandisation de l’enfant et par extension de la vie humaine. L’embryon
devient un objet de convoitise assimilable à n’importe quel produit de consommation. Dans un proche avenir, on peut même imaginer l’achat en pharmacie de paillettes de sperme ou d’ovules
congelées qu’on pourrait se procurer aussi
facilement que la pilule contraceptive ou le Viagra, le tout
remboursé par la Sécurité Sociale, au nom de ce « droit à l’enfant »
brandi
comme un dogme par les
partisans de la loi.
Au terme de cet argumentaire, une conclusion s’impose :
Le « mariage » pour quelques-uns est en fait une menace « pour tous » :
A l’évidence, l’adoption de ce projet de loi fait courir à notre société
un
danger d’autant plus grand
qu’il est paré de toutes les vertus aux yeux du plus grand nombre.
Pour employer le langage des
internautes, c’est un dangereux « cheval de Troie
» qu’on introduit dans la législation française.
« Malheureux citoyens, quelle folie est la vôtre ! »
s’écriait Laocon en voyant les Troyens disposés à
introduire ce cheval maudit dans les murs de leur ville (Enéide, II, 42).
Abandonné sur la plage, ce cheval
imaginé par Homère avait tous les attraits d’un cadeau des dieux.
Les
Troyens sont restés sourds à l’avertissement de Laocoon.
Ils
ont fait mieux. Pour faciliter l’entrée du cheval
dans la ville, ils n’ont pas hésité à abattre une partie de leurs murailles.
On connaît la suite ! …
Il est vain d’imaginer qu’on puisse contenir toutes les dérives inhérentes au projet
de
loi tel qu’il est
présenté aujourd’hui. C’est bien sur la notion même de « mariage pour tous
» qu’il faut se battre et
résister. Si cette digue saute, le risque de submersion est hors de tout contrôle.
Daniel Godard
Professeur de Lettres
Classiques
Dans le cortège des partisans de la loi
« le mariage pour tous », il
y avait un slogan intéressant :
« UNE PAIRE DE MERES VAUT MIEUX QU’UN PERE DE MERDE »
Si l’on accepte de faire l’impasse sur le caractère outrancier et injurieux du propos, ce slogan est une aubaine
!
Pour la première fois, l’union de deux femmes est reconnue comme une « paire » et non comme « un couple » J’y vois la confirmation (involontaire) de mon analyse du mot « couple ».
Les arguments en faveur du mariage homo s’effondrent d’un coup devant cette évidence.
Merci
à celui ou à celle qui
est à l’origine de ce slogan lumineux et providentiel !