Souvenirs de Genève 2, janvier 2014: à la rencontre des Syriens d’Europe
François BELLIOT
Il
y a un peu plus de deux ans, en janvier 2014, je me suis rendu à
Montreux (Suisse) dans le cadre d’un voyage organisé par des
associations syriennes contestant le récit officiel des événements. Les
Syriens de France venaient converger, avec d’autres Syriens venus de
différents pays d’Europe pour faire entendre leur voix devant le lieu où
se déroulaient les négociations de Genève II. Dans cette chronique je
raconte le déroulement de cette manifestation et restitue le témoignage
de Syriens venus de pays autres que la France, pour parvenir au constat
suivant : l’intoxication médiatique est à peu près la même partout. Je
publie cette chronique avec deux ans de retard car je n’ai pas trouvé
l’occasion à l’époque de la publier dans le cadre convenable. Par la
suite j’ai voulu l’intégrer à mon livre sur la guerre en Syrie,
mais il s’est avéré que cela coupait trop la trame de ma démonstration.
Mieux valant tard que jamais, et cette chronique n’étant pas, à mon
humble avis, dénuée d’intérêt, je la publie à part sur mon site
Observatoire des mensonges d’état.
Une Manifestation de soutien à Bachar el-Assad à Montreux
Le 22 janvier 2014 s’est tenue, dans la ville de Montreux (Suisse), une
manifestation de soutien aux autorités syriennes et à son président
Bachar el-Assad. Montreux, c’est en effet la ville où s’est tenue, la
semaine dernière, la conférence de Genève II. La conférence aurait dû se
tenir à Genève, mais a été déplacée dans la ville de Montreux,
célèbre pour son festival de jazz. Au même moment en effet se déroulait un immense congrès des
horlogers qui n’avait pas eu lieu depuis des années et il n’y avait plus
assez de place dans les hôtels de Genève pour loger toutes les
délégations ; ce qui a poussé les organisateurs de la conférence à la
déplacer dans la ville de Montreux.
La manifestation était organisée par l’Union des Étudiants Syriens
(UnES), fédération des étudiants syriens étudiant en Europe, et son
organisation centralisée par la branche française de l’UnES. L’idée
était de rallier le plus grand nombre de Syriens vivant en Europe pour
le jour d’ouverture de la conférence. Pour ce faire des cars ont été
affrétés dans des capitales européennes pour rallier la ville de
Montreux ce 22 janvier.
Les Syriens de France formaient de loin le plus nombreux contingent de
manifestants, comme nous nous en sommes rendus compte sur place. 150
personnes, dont une poignée de Français ont ainsi pris la route dans
trois cars, qui sont partis de Paris dans la nuit du 21 afin d’arriver 9
heures plus tard pour le début de la conférence.
Le
programme était extrêmement ramassé : nous étions censés arriver le
matin après huit heures de car, demeurer présents sur place quelques
heures pour la manifestation, puis repartir immédiatement sur Paris pour
y être avant minuit.
La ville de Montreux, le cadre enchanteur où se sont déroulés les négociations de Genève 2 en janvier 2014 |
Le voyage s’est déroulé sans encombre et dans la bonne humeur. Nous
avons malheureusement été ralentis à deux reprises, ce qui nous a
empêchés d’être présents au moment de l’arrivée des délégations. Nous
sommes restés une heure et demie coincés à la frontière, les douaniers
suisses ayant décidé de vérifier les papiers de tous les passagers et
d’examiner minutieusement les trois cars. Une fois arrivés aux abords de
la ville de Montreux, nous avons eu la mauvaise surprise de constater
que la zone de stationnement qui nous avait été allouée était à
plusieurs kilomètres du lieu où se tenait la conférence.
A l’approche du centre ville, notre cortège a été canalisé par un
dispositif policier mis en place pour l’occasion afin d’éviter
d’éventuels débordements. De fait, nous avons croisé un groupe d’une
vingtaine de manifestants anti Assad, encadrés par des policiers et
scandant des slogans contre le « régime » syrien et les gens de notre
groupe qui passaient devant eux à distance en flux continu. Ce fut
l’occasion pour l’un et l’autre camp de s’invectiver à distance, sous
l’attention vigilante des policiers.
En approchant du lieu de la conférence, les Syriens commencèrent à
entonner des slogans et des chants. Les passants que nous croisions
étaient extrêmement surpris. « On n’a pas vu cela depuis dix ans »,
me dit un habitant descendu de chez lui attiré par le bruit. Montreux
est en effet d’ordinaire une petite ville aussi paisible que le lac
immense (le Léman) qui la borde, et cette manifestation, qui n’a pas
compté plus de 300 participants, était en soi un événement pour les
habitants de cette ville peu habituée à ce genre de conférences
internationales, et aux manifestations qui peuvent l’accompagner
Je connaissais de nombreux participants, pour avoir arpenté en leur
compagnie les rues de Paris lors de manifestations de soutien aux
objectifs identiques. Les drapeaux, les visages, les chants, les
slogans, étaient les mêmes. Ces Syriens ne s’étaient pas déplacés à
Montreux pour produire un nouveau discours, mais simplement pour
affirmer, par leur présence et leurs slogans, leur soutien au
gouvernement légal de la Syrie en cette circonstance cruciale pour
l’avenir de leur pays, la conférence de Genève 2 étant susceptible
d’entériner un règlement politique de la guerre.
Invité par ces Syriens pour couvrir la manifestation, j’étais venu avec
l’idée suivante : comparer le discours des Syriens habitant dans
différents pays d’Europe. Quel était leur point de vue sur la crise
syrienne, et que pensaient-ils du traitement médiatique ce cette crise
par les médias des pays où ils résidaient ?
Parvenus sur le lieu de la manifestation, nous avons donc rencontré les
autres Syriens qui avaient fait le voyage pour Montreux. Il y avait des
Syriens des Pays-Bas, de Suisse, de Belgique, d’Italie, et de Roumanie.
Ces derniers avaient fait le voyage en car depuis Bucarest.
Les manifestants venus de France formaient, comme je l’ai dit, le contingent le plus nombreux de Syriens.
http://editions.sigest.net/page00010171.html |
La couverture de la crise syrienne par les médias de masse européens
Tous les Syriens que j’ai interrogés m’ont brossé à peu près le même
tableau : la couverture médiatique des événements de Syrie dans leurs
pays de résidence est d’une partialité qu’il serait profondément
malhonnête de nier.
Voici la compilation de leurs points de vue.
Pour un Syrien de Hollande,
s’il existe quelques journalistes honnêtes dans ce pays, les médias de
masse hollandais sont acquis à la cause de la diabolisation du régime et
de son renversement.
Pour un Syrien de Belgique, « Les
médias belges soutiennent plutôt un camp et ce camp est plutôt celui du
terrorisme que celui du gouvernement en place. Il y a des terroristes
en Syrie qui viennent de pays d’Europe. C’est des gens qui ont des
nationalités, ils ne peuvent pas les interdire de revenir. l’Arabie
saoudite et le Qatar les aide; ils exportent ces terroristes vers la
Syrie mais en fin de compte ils vont revenir en Europe. C’est nous qui
allons avoir alors le plus de problèmes. Des points de vue comme le mien
ne sont pas du tout exprimés dans les grands médias, pas seulement en
France et en Belgique. Il n’y a pas moyen de faire entendre notre point
de vue parce qu’ils sont un peu bloqués sur l’aide aux terroristes, les
salafistes, les wahhabites, plusieurs groupuscules qui sortent de nulle
part. Ils ont beaucoup d’argent, je vous montre des photos. Voilà ce
qu’ils font à nos enfants : ils les enlèvent de l’école. Regardez, comme
ils l’obligent à tuer un soldat de l’armée officielle de la Syrie.
C’est vraiment insupportable. On ne nous laisse pas donner notre point
de vue. »
(il me montre une série de photos sur lesquelles on voit un enfant
décapiter à grand peine un soldat sous la surveillance d’hommes armés
abondamment barbus)
Il n’y avait pas de Syriens d’Italie, mais une association italienne avait fait le déplacement en car depuis Rome. Une jeune femme m’a fait cette réponse.
« Nous
avons fondé cette organisation en Italie mais nous contactons d’autres
groupes en Europe, par exemple, en Espagne, en Belgique, en République
tchèque, nous avons également des contacts avec l’Amérique du sud, le
Canada. Nous sommes des jeunes gens qui entrons en contact avec des
Syriens dans notre pays. Nous pensons que les médias en Italie racontent
des choses fausses à propos de la crise syrienne, nous pensons qu’ils
mentent. En Italie les médias sont contre Bachar el-Assad et le
gouvernement syrien. Nous sommes venus à douze en car de Rome. »
J’ai pu également discuter avec un membre d’un petit groupe de Syriens de Roumanie :
« Nous
arrivons de Roumanie. Nous avons fait 24 heures de car pour nous
retrouver à cette manifestation. Nous repartons immédiatement après la
fin de la manifestation. Je suis roumain, mais je suis originaire de
Syrie. Nous sommes venus ici pour montrer que nous soutenons notre pays,
le drapeau syrien, notre président Bachar el-Assad, pour défendre
l’idée que nous sommes attaqués par des terroristes appuyés par les pays
occidentaux, pour défendre la paix en Syrie et le désarmement des
mercenaires qui se rendent en Syrie, et nous espérons que cette
conférence va nous ramener la paix qui régnait avant. Ces mercenaires
tuent nos enfants, les empêchent d’aller à l’école. Certains sont tués
ou kidnappés pour de l’argent. C’est la façon dont ils veulent nous
apporter la démocratie. Les médias de masse en Roumanie sont contrôlés.
Ils disent que Bachar el-Assad tue son propre peuple avec des armes
chimiques. Nous essayons de rétablir la vérité par les réseaux sociaux
et par internet. Dès que les journalistes savent que leur interlocuteur
défend une opinion différente, la plupart du temps ils nous ignorent.
Ils ne donnent la parole qu’à ceux dont ils savent qu’ils défendent la
version officielle des événements. »
Je n’ai pas rencontré de Syriens de Suisse, mais j’ai pu discuter avec des Suisses qui ont pu m’apporter quelques éléments. Pour l’un, « ce
que nous montrent nos médias traditionnels, c’est plutôt qu’on a un
vilain dictateur, et en fait c’est tout le contraire, on a un peuple qui
le soutient. »
Pour autant, les grands médias suisses seraient tout de même plus
impartiaux que dans des pays comme la France ou la Belgique : « sans vouloir faire de chauvinisme, précise-t-il,
la couverture médiatique reflète mieux une certaine réalité, mais c’est
toujours des médias qui vont dans le sens des puissances, de toutes les
manières, mais ça, ça n’est pas seulement en France et en Suisse. Tout
de même, si vous avez la chance de regarder ce soir la RTSA, vous verrez
qu’ils vont diffuser exactement les mêmes images : il n’y aura pas
d’images trafiquées ou d’images qui vont désavantager cette
manifestation pacifique. » Un journaliste suisse que j’ai rencontré dans la manifestation m’a dit à peu près la même chose : « Les
événements ont été traités de façon factuelle et relativement
objective ; ici en Suisse c’est un peu différent de la France, car la
Suisse est un pays complètement neutre. Ici on n’a pas de journaux
d’opinion. Après, les éditorialistes peuvent prendre position. C’est pas
comme en France avec d’un côté Libération, de l’autre le Figaro et au
milieu le Monde, qui sont des journaux d’opinion. Ici il n’y en a pas. »
Il y avait peu d’autres nationalités en dehors des Syriens, de Suisses,
d’Italiens, de Roumains et des nombreux Français. J’ai pu toutefois
avoir des échanges intéressants avec des gens originaires d’autres
pays ; je tiens en particulier à citer le témoignage d’un Hondurien qui a
établi un parallèle saisissant entre la situation de la Syrie et celle
de son pays, dirigé par une dictature militaire depuis 2009. Je m’écarte
un peu de mon sujet en retranscrivant cette réflexion mais elle
présente l’intérêt de montrer que les méthodes violentes et retorses
utilisées pour déstabiliser la Syrie l’ont déjà été par le passé dans
d’autres régions du monde, et par les mêmes. Les gens qui jugent
incroyable que des pays occidentaux soient capables de pousser
l’immoralité jusqu’à infiltrer des bandes de terroristes sanguinaires
dans un pays, tout en couvrant l’opération par un médiamensonge basé sur
l’inversion accusatoire, doivent savoir que ce procédé, loin d’être
novateur, est en fait un grand « classique ».
« Je
viens du Honduras et je représente un peu le Front national de
résistance populaire du Honduras, qui s’est développé après le coup
d’état en 2009. De même que les Syriens se battent pour leur
souveraineté nationale, pour qu’elle soit respectée à travers le monde,
qu’il n’y ait pas de puissances étrangères, généralement du camp
occidental, qui viennent mettre leur nez, ou donner des armes aux
terroristes, ou à des gens que eux considèrent bienveillants, et bien
nous les soutenons depuis le Honduras. Nous aussi on se bat pour la
souveraineté nationale et ce combat du coup, est le même, pour le peuple
syrien, aussi bien que pour le peuple hondurien. (je lui pose une question sur les escadrons de la mort Contras infiltrés au Nicaragua à la fin des années 70).
Nous le Honduras, on pourrait presque nous comparer à ce qu’est la
Turquie au Moyen-Orient, parce qu’on a servi de base étant donné qu’on
était au centre, on servait de base pour les contras, et je trouve que
ce qui se passe en Syrie est très similaire à ce qu’ils ont fait au
Nicaragua, à l’exception qu’au Nicaragua il y avait une révolution,
ensuite les contras sont arrivés, alors que là c’est un gouvernement qui
est en place depuis quand même pas mal d’années, qui est du coup
légitime depuis un moment, et depuis, comme on l’a vu, c’est M. Roland
Dumas qui l’a dit, depuis apparemment déjà 2011, il y a des négociations
chez les occidentaux pour renverser ce régime qui ne se plie pas aux
ordres des États-Unis, qui ne se plie pas aux ordres d’Israël, parce que
ça aussi il faut le préciser, il y a eu beaucoup de contre informations
dans les réseaux pro palestiniens en France qui apparemment disaient
que Bachar el-Assad attaquait les Palestiniens, ce qui est complètement
faux. Le régime syrien est le seul régime arabe à avoir eu le courage
d’outrepasser le blocus mis en place par Israël sur la bande de Gaza, à
avoir fourni de la nourriture, de l’eau et des armes aux Palestiniens ;
ce sont les seuls et cela il faut le rappeler, c’est la Syrie le plus
grand protecteur de la Palestine dans cette région, et d’ailleurs ce
sont les seuls dans cette région à s’être confrontés à Israël dans le
cadre d’une guerre, et cela ça n’est pas rappelé. (je lui pose une question sur la situation actuelle au Honduras) :
en 2009 le président démocratiquement élu, Zelaya, avait proposé un
referendum pour réformer la constitution, il y a eu un coup d’état
militaire, les militaires l’ont dégagé du pays, on allant carrément le
chercher chez lui en pyjama. Suite à ça il y a eu des élections où 20 %
seulement de la population est allée voter, ce n’était donc absolument
pas démocratique. En 4 ans on a eu un régime dictatorial. On a eu 300 à
400 morts en assassinats politiques, de tous les bords. On est devenu le
pays le plus dangereux du monde, avec le plus haut taux d’homicides par
habitants. On est à 86 meurtres pour 100000 habitants par an, et en
décembre passé il devait y avoir des élections avec le nouveau parti qui
avait été créé suite à la résistance, qui s’appelait le « Libre », et
il y a eu une fraude généralisée à tous les niveaux, ça veut dire que le
candidat du fascisme, qui est du parti national, il s’est déclaré
vainqueur avant même le résultat du scrutin. Il y a eu des gens qui
n’avaient pas pu aller votre mais leur vote s’est retrouvé pour le parti
national, donc un fraude généralisée, et là en ce moment ils sont en
train de passer toutes les lois car ils savent qu’aux prochaines
élections ils ne gagnerons pas, donc ils font en sorte de bloquer de la
situation, de nous endormir, pour continuer à maintenir leur hégémonie
sur notre pays et que ça continue car nous sommes une zone très
stratégique, ; au Nicaragua ils sont capables de lâcher du lest, nous
ils ne nous en lâcherons pas. »
Bilan
En interrogeant exclusivement des gens soutenant les autorités
syriennes légales et dénonçant les incursions continues de terroristes
sur le sol syrien, il était fatal que j’obtinsse un point de vue plus
uniforme que si j’avais croisé ces témoignages avec ceux de militants
appelant à la chute du régime. Je ne pense pas néanmoins que cela fausse
la vision d’ensemble.
Je connais assez bien le fonctionnement de la propagande anti Assad en
France, que j’ai décrypté en détails dans dans mon ouvrage « Guerre en Syrie, le mensonge organisé des médias et des politiques français – tome 1« .
Les gens qui défendent en France la version officielle de la crise
syrienne sont massivement soutenus par les médias de masse et les
institutions étatiques, et largement financés par des fonds issus d’on
ne sait où. Il est très difficile, par ailleurs, d’avoir une discussion
honnête avec eux : tout de suite ils s’énervent, coupent la parole,
insultent. Je rappelle que le soutien massif de l’état à une version
officielle, avec lynchage médiatique du camp adverse, est devenu de nos
jours l’indice quasi infaillible d’un mensonge politico-médiatique
organisé.
Les Syriens des autres pays d’Europe que j’ai interrogés ont tous
développé la même analyse que leurs compatriotes de France. Si l’on
excepte le cas de la Suisse, qui est très particulier, le traitement
médiatique de la crise syrienne est apparemment identique en Roumanie,
en Belgique, en Italie, et en Belgique. Nous aurions donc affaire à un
mensonge organisé, non pas dans un seul pays occidental, mais dans
l’ensemble des pays occidentaux.
Je terminerais ce compte-rendu par deux séries de remarques sur
l’attitude des forces de l’ordre pendant cette manifestation à Montreux,
et la couverture de cette manifestation par les médias de masse
français.
Le comportement des forces de l’ordre
Des policiers suisses balisaient le parcours dans le cadre d’un
dispositif plutôt léger et relâché, si l’on compare avec les moyens mis
en œuvre à Paris dans le cadre de manifestations de plus grande ampleur.
Aucun incident n’a été à déplorer en cette journée. Il est vrai que
nous n’étions guère plus de 300, et que le gros des manifestants étaient
composées de familles venues pour certaines avec leurs enfants.
Les policiers suisses avaient tout de même érigé un cordon de sécurité
pour empêcher les manifestants de trop s’approcher de l’entrée du lieu
de la conférence. Des bâches blanches avaient également été tendues sur
les deux cents derniers mètres pour limiter les contacts visuels entre
les manifestants et les participants à la conférence.
Cela n’a pas dissuadé les manifestants de scander chants et slogans à pleins poumons pendant près de deux heures.
C’est peut-être ce déluge sonore qui a poussé les policiers, 20 minutes
après l’arrivée des 150 personnes de notre groupe, à repousser la
manifestation plus haut dans la rue. Mais, bien vite, constatant le
caractère pacifique de la manifestation, ces mêmes policiers ont reculé,
pour reformer leur cordon de sécurité à l’endroit initial. Nous avons
pu constater la sympathie de certains policiers. Un officier de police
est même allé jusqu’à nous donner sa carte de visite.
Couverture de cette manifestation par les médias de masse français
Cette manifestation de militants syriens pro Assad a été couverte par
les médias de masse français présents en nombre sur place pour
l’occasion.
Vu le nombre de manifestants, ils auraient pu ignorer purement et
simplement cet événement organisé en marge de la conférence. Maintenant
on sait que le nombre n’est pas un critère : quand une manifestation
sert le « système » ou un mensonge d’état, les journalistes peuvent la
relayer même si elle ne comporte qu’une poignée de manifestants. C’est
ainsi qu’on a pu voir Jean-Luc Mélenchon organiser, en collaboration
avec TF1, une mise en scène
visant à donner une impression de foule là où il n’y avait qu’un petit
groupe de militants du Front de Gauche. Inversement des manifestations
de moyenne ou grande ampleur peuvent être ignorées ou rapportées de
façon mensongère dans le but de diaboliser ceux qui y participent. Tout
cela participe de la « contestation organisée », une soupape mise en
place par les tenants du système pour donner l’impression du pluralisme
démocratique et du respect de la liberté d’expression.
Si la manifestation avait été contenue à un kilomètre des lieux de la
conférence, personne en France n’en aurait entendu parler (de la même
façon que de nombreuses manifestations sont passées sous silence dans
notre pays), mais là elle était à quelques mètres de l’entrée du
bâtiment où se tenait la conférence, et il était impossible d’y échapper
et de ne pas l’entendre
De façon frappante, les journalistes de ces médias sont demeurés de
l’autre côté de la barrière érigée par les policiers suisses, et presque
aucun n’a eu la curiosité de la franchir ( ce qui a priori ne leur
était pas interdit) pour aller interroger directement ces militants, qui
malgré leur colère sont demeurés de bout en bout pacifiques.
La seule trace ou presque de cette manifestation est donc une séquence de 1 minute 10 délivrée par l’AFP avec un commentaire d’une phrase et repris tel quel sur la totalité des sites internet des médias de masse.