samedi 11 juillet 2020

L’ISLAM CONQUERANT D'ERDOGAN

L’ISLAM CONQUERANT D'ERDOGAN

Il agit comme un rouleau compresseur. Ses ambitions sont sans fin. En Turquie, il vise à créer un État religieux sur les cendres de l’héritage d’Atatürk...


Christophe Lamfalussy, La Libre Belgique, 11 juillet 2020


Il fut un temps où Istanbul, ce pont entre l’Europe et l’Asie, symbolisait la cohabitation des cultures et des civilisations. Ses vieux quartiers illustraient son histoire, témoignages des communautés arménienne, grecque et juive qui y vivaient, de façon significative, jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, en entente avec une majorité musulmane dont la foi était une affaire personnelle.

Depuis l’arrivée au pouvoir d’Erdogan, cet équilibre fragile a été pas à pas rompu. Flattant son électorat religieux, le leader turc a fait ériger des mosquées, telles des baïonnettes dans le ciel, jusque sur la place Taksim, haut lieu de la contestation laïque de son pouvoir. " ", avait déclaré M. Erdogan en 1997, ce qui lui avait valu une peine de dix mois de prison pour incitation à la haine. Les mosquées sont nos casernes, les coupoles nos casques, les minarets nos baïonnettes, les croyants nos soldats… L’heure de la revanche est arrivée.

Après avoir mis au pas l’armée, emprisonné des milliers d’intellectuels et de fonctionnaires accusés d’avoir adhéré au mouvement du prédicateur Fethullah Gülen, le président turc a annoncé, vendredi, la transformation en mosquée de l’ancienne basilique de Sainte-Sophie. Celle-ci restera ouverte aux touristes.

Mais il concrétise ainsi un vieux rêve de révoquer la décision, prise en 1934 par Atatürk, de faire de Sainte-Sophie un musée et, par là même, d’honorer la décision du sultan ottoman Mehmet II Fatih venu prier à Sainte-Sophie à la prise de Constantinople, en 1453.

L’islam d’Erdogan est un islam des conquêtes. Il agit comme un rouleau compresseur. Ses ambitions sont sans fin. En Turquie, il vise à créer un État religieux sur les cendres de l’héritage d’Atatürk.

Dans les pays voisins, il envoie son armée, en Irak, en Syrie, en Libye.

Et ce 15 juillet, date anniversaire du putsch manqué, il organise de grandes cérémonies, dont un son et lumière avec 200 drones sur le pont des Martyrs, et près de 750 événements à l’étranger. De quoi faire oublier aux Turcs les misères de la pandémie et de l’économie…


Source : 
https://www.info-turk.be




NDLR de E&O : Un petit bémol à cette affirmation de l'auteur : "...communautés arménienne, grecque et juive qui y vivaient, de façon significative, jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, en entente avec une majorité musulmane..."

Ces communautés ont été, de tout temps, considérées comme des "dhimmis" sous les ottomans, citoyen de seconde zone et harcelées moralement, physiquement et économiquement. Sans rentrer dans les détails les massacres hamidiens de 1894-96, le pogroms d'Adana de 1909, le génocide de 1915, pogroms de Thrace en 1934, l'impôt inique de 1942, la nuit barbare de 6-7 septembre 1955... sont autant de pages noires. C'est la preuve aussi de la continuité des actes criminels entre la période ottoman, jeunes turcs, kemalisme et islamisme d'aujourd'hui.  (cf. Le recyclage des criminels Jeunes-Turcs, Marc de Garine, Sigest, 2019)